Quand les cheveux deviennent ressource

Quand les cheveux deviennent ressource

Publié le 15 nov. 2021 - Mis à jour le 16 nov. 2021

Les coiffeurs de l’Agglomération reçoivent ces temps-ci la visite de salariés de l’entreprise d’insertion Tous de Mèche. Elle récupère les déchets « cheveux » pour en faire une ressource utile à la fabrication d’écoproduits, tels des coussins de dépollution des océans. Une belle démarche d’économie circulaire, tout comme celle menée dans le cadre du programme européen CircularSeas.

tous de meche

Savez-vous qu’en France on compte deux fois plus de salons de coiffure que de boulangeries ? L’Agglomération de La Rochelle totalise à elle-seule quelque 220 salons, la Charente-Maritime 800, soit un gisement annuel de 40 tonnes de cheveux coupés (en moyenne 50 kg/an et par salon). Voici une masse dont il serait bon d’alléger les poubelles tout en créant de nouveaux emplois et de nouveaux écoproduits. Le projet «Tous de Mèche » coche toutes les cases d’un développement durable (environnement - social - économie). Il associe localement ADCR Services, une structure d’insertion par l’activité l’économique (SIAE) dont le siège social est à Rochefort, et une start-up nommée Capillum.

Tous de mèche

Trois façons de recycler

Cette jeune société est née il y a deux ans à Clermont-Ferrand. Ses deux fondateurs, James Taylor et Clément Baldellou, ont étudié comment faire du déchet de cheveux une ressource utile dans plusieurs domaines. Tout d’abord la dépollution des eaux et des sols : le cheveu révèle une importante capacité d’absorption naturelle, il peut pomper 8 fois son poids en hydrocarbures. Ensuite, le cheveu associé à d’autres fibres naturelles comme la laine peut être transformé en tapis de paillage agricole, remplaçant les bâches plastiques utilisées pour protéger les jeunes plants. Enfin, nos chevelures contiennent de la kératine, matière qui intéresse la recherche médicale pour l’amélioration des soins de peau. « La société Capillum élabore des filières de recyclage du cheveu dans ces 3 domaines. Nous avons passé un accord de partenariat avec elle pour développer localement les 2 premiers », affirme Evelyne Chaussade, directrice de Tous de Mèche Adcr Services. « Nous avons lancé en Charente-Maritime une expérimentation qui intègre la dimension de l’insertion sociale au projet Capillum », ajoute-t-elle.

De premiers emplois créés

Adcr Services accompagne vers l’emploi des chômeurs de longue durée et (ou) bénéficiaires des minima sociaux. Avec Tous de Mèche, l’association crée de nouveaux emplois. « Nous formons des salariés en parcours d’insertion à aller à la rencontre des coiffeurs, à leur expliquer la démarche et à se charger ensuite de la collecte des cheveux ». En terme de recyclage, tous les cheveux sont bons à prendre, qu’ils soient courts, longs, blonds, noirs, gris, colorés, peu importe. Des boites « capibac » sont fournies aux coiffeurs adhérents et récupérées chaque fois qu’ils les signalent comme pleines. Les stickers à coller sur les vitrines permettent de distinguer ces salons auprès de clients sensibles à cette transformation d’un déchet en une matière utile. « Nous avons depuis peu lancé la prospection auprès des coiffeurs du territoire de l’Agglomération de La Rochelle » indique Evelyne Chaussade.

Un futur site de recyclage

A plus long terme, le partenariat de Capillum et Tous de Mèche vise à implanter localement un site de transformation des cheveux collectés. « Ainsi, nous créerions des emplois locaux supplémentaires sur la fabrication de tapis de paillage agricoles qui maintiennent l’humidité des sols, mais surtout sur des coussins absorbant à base de cheveux pour la dépollution marine ou terrestre » décrit l’animatrice du projet. Côté terre, ces sortes d’éponges de cheveux peuvent filtrer en bord de route les résidus d’hydrocarbure drainés par la pluie vers les nappes phréatiques. Côté mer, ces mêmes coussins de cheveux peuvent intervenir en cas de pollution de surface, toujours par des hydrocarbures. « Ce type d’application devrait intéresser le Port Atlantique La Rochelle, le port de pêche de La Rochelle et celui de la Cotinière » espère Evelyne Chaussade. « Cela confirmerait notre logique d’économie circulaire et de proximité : une ressource issue du recyclage de déchets locaux est utile localement et crée de l’emploi sur place ».

Economie circulaire

Cette idée de transformer un déchet en ressource est aussi au cœur du programme expérimental européen CircularSeas. L’Agglo de La Rochelle et l’Université y sont impliquées, comme d’autres partenaires en Espagne, Irlande, Portugal et Royaume-Uni. Le programme s’intéresse plus spécifiquement au potentiel de recyclabilité des déchets en plastique des filières maritimes, ceux de la pêche et de l’aquaculture en particulier qui, une fois collectés, pourront être broyés et intégrés à la fabrication de bobines de filaments pour imprimantes 3D. A leur tour, ces imprimantes pourront fournir des pièces de réparation ou de fabrication utiles à ces filières. D’autres produits éco-innovants pourront être conçus en vue de boucler une boucle économique qui limiterait l’impact environnemental des filières maritimes.

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